Un vingt-e-deux septembre au diable vous partîtes,
Et, depuis, chaque année, à la date susdite,
Je mouillais mon mouchoir en souvenir de vous
Or, nous y revoilà, mais je reste de pierre,
Plus une seule larme à me mettre aux paupières :
Le vingt-e-deux septembre, aujourdhui, je m'en fous.
On ne reverra plus, au temps des feuilles mortes,
Cette âme en peine qui me ressemble et qui porte
Le deuil de chaque feuille en souvenir de vous
Que le brave Prévert et ses escargots veuillent
Bien se passer de moi pour enterrer les feuilles :
Le vingt-e-deux septembre, aujourdhui, je m'en fous.
Jadis, ouvrant mes bras comme une paire d'ailes,
Je montais jusqu'au ciel pour suivre l'hirondelle
Et me rompais les os en souvenir de vous
Le complexe d'Icare à présent m'abandonne,
L'hirondelle en partant ne fera plus l'automne :
Le vingt-e-deux septembre, aujourdhui, je m'en fous.
Pieusement noué d'un bout de vos dentelles
J'avais sur ma fenêtre un bouquet d'immortelles
Que j'arrosais de pleurs
En souvenir de vous
Je m'en vais les offrir au premier mort qui passe
Les regrets éternels à présent me dépassent
Le vingt-e- deux septembre, aujourd'jui, je m'en fous
Désormais le petit bout de cœur qui me reste
Ne traversera plus l'équinoxe funeste
En battant la breloque en souvenir de vous
Il a craché sa flamme et ses cendres s'éteignent,
A peine y pourrait-on rôtir quatre châtaignes :
Le vingt-e-deux septembre, aujourdhui, je m'en fous.
Et c'est triste de n'être plus triste sans vous.